Avril2017 auteur : danielvidal9@hotmail.com

Retour à l'accueil.                                                                             Retour traumacranien.info


Les 2 séquences vidéos que je vous propose de regarder concernent un homme de 61 ans retraité qui a été victime d’un accident de la voie publique occasionnant un traumatisme crânien.

Il avait regagné  son domicile auprès de son épouse au moment de ces 2 vidéos après une longue période de soins intensifs et de rééducation.

Les 2 séquences vidéos se déroulent 3 ans après l’accident qui a entraîné des déficiences cognitives et des troubles du comportement et en particulier une agnosie visuelle importante et une prosopagnosie.

Il est dans la période des 2 séquences  vidéos, obsédé par l’envie de reconduire une automobile, mais ne s’en sent probablement pas capable pour des raisons qui échappent plus ou moins à sa cohérence intellectuelle.

A ce moment de sa vie, ce qui prime et occulte tout c’est son envie irrépressible de conduire une automobile qu’il imagine être pour lui un palier primordial pour accéder à plus de liberté et plus d’autonomie.

Dans la mesure où il pressent plus ou moins intuitivement qu’il sera en difficulté pour conduire une voiture, tout en restant persuadé que les perturbations de sa capacité de reconnaissance finiront par s’arranger, il développe une analyse subjective tronquée de la réalité qui l’entraine vers des solutions inadaptées.

Il y a probablement une anosognosie relative dans cette volonté de reconduire, car s’il ne se trompe probablement pas sur sa capacité instinctive à reconduire un véhicule automobile, il ne réalise pas par contre qu’en raison de l’agnosie visuelle, sa capacité d’anticipation de situations de conduite pourrait être mal maitrisée.

Il y a aussi une forme plus ou moins importante de déni, car il sait plus ou moins intuitivement qu’il sera en difficulté et malgré un caractère bien trempé conservé après l’accident, il n’a jamais exigé d’essayer de conduire un véhicule automobile, mais il en exprime fréquemment l’envie en spéculant sur la date ou selon lui ce sera possible.

Il se trouve qu’au pied de son immeuble, il y a une auto-école devant laquelle il passe tous les jours et c’est pour cela qu’il a manifesté le désir de s’y rendre, car il est persuadé qu’il doit reprendre des cours de code pour conduire de nouveau. Il argumente en disant que le code a changé depuis qu’il a passé le permis il y a de nombreuses années et qu’il faut qu’il se mette à jour.


Il s’est rendu accompagné une première fois à l’auto-école pour s’inscrire et il a fait la séance de code avec son auxiliaire de vie, mais il a voulu s’y rendre seul le lendemain et c’est l’objet de la première vidéo.

En raison d’une forme relative d’anosognosie, il n’a pas mesuré lors de la première séance, qu’il a faite avec l’aide de l’auxiliaire de vie, les difficultés de lecture des diapositives, mais également les difficultés des corrections pour lesquelles il avait été aidé, et c’est donc toujours parce qu’il ne reconnait ni ne mesure ses difficultés de reconnaissance visuelle qu’il a entrepris d’y retourner seul.

Il y a également une forme de déni, car il avait plus ou moins conscience qu’en y allant seul il allait se trouver en difficulté, car il conserve un mode de fonctionnement qui l’incite à essayer en disant en boucle « il faut bien que j’essaye si je veux y arriver » et en estimant que son échec est dû à la faute des autres.

La seconde vidéo s’est déroulée le même jour que la première et nous démontre qu’il n’assume pas son incapacité à suivre et à corriger un cours de code.


Son exigence d’être corrigé et de recevoir une appréciation de son résultat est plus ou moins en lien avec l’anosognosie qui l’empêche de prendre conscience de la réalité du fonctionnement d’un cours de code.

Il y a aussi une forme plus ou moins importante de déni dans sa focalisation sur des cours de code alors qu’il sait plus ou moins au fond de lui qu’il s’agit d’un expédiant qui lui permet d’évacuer l’impériosité de son envie de reconduire.

Il faut ajouter à cela une blessure narcissique due à ce qu’il a ressenti comme une humiliation, comme du mépris de la part de la personne qui recueillait les feuilles de résultats.

J’ai relativisé l’incidence de l’anosognosie et du déni dans ce compte rendu d’une situation, car j’estime que les troubles intellectuels d’analyse et de discernement pragmatique des situations qui affecte ce monsieur ne permettent pas selon moi d’affirmer avec certitude qu’il s’agit totalement de l’un ou de l’autre, mais plutôt qu’il y a une incidence relative de l’anosognosie et du déni dans ses comportements.

Je vous cite l’adage « la fin justifie les moyens » pour corroborer le fait qu’une personne cérébrolésée face à une situation dont elle a du mal à maîtriser les tenants et les aboutissants, se réfugiera dans des solutions, des comportements qui seront des finalités que nous aurons parfois du mal à interpréter en raison de leurs expressions que je qualifierai de « brut de décoffrage » et qui seront pour la personne cérébrolésée une planche de salut momentané à laquelle elle s’accrochera résolument en dépit de tous les arguments plus ou moins contraignants que nous lui objecterons.

Son désir de reconduire une automobile ne sera jamais abordé avec lui frontalement, car il mettait en balance avec une violence verbale confuse la qualité de sa vie, tournant en boucle sur ses obsessions et s’emportant sur les conséquences de son accident ou selon ses dires il aurait mieux valu qu’il décède et il évoquait parfois dans ses colères le désir d’en finir avec une vie qui ne lui convenait plus puisqu’il ne pouvait pas reconduire une voiture.

Ces vidéos ont été tournées en novembre 2009 et ce monsieur continuera pendant un an à se rendre de temps en temps dans des auto-écoles dont il changera à plusieurs reprises au gré de ses humeurs et de ses interprétations subjectives de l’accueil qu’il y reçut. Il fut toujours accompagné d’une auxiliaire de vie pour l’aider dans cette démarche. Il abandonnera ensuite l’envie d’aller aux cours de code en revendiquant toujours agressivement son envie de reconduire une automobile pendant plusieurs années. La volonté de reconduire s’estompera au cours du temps et à l’heure actuelle, en 2017, il ne la manifeste pratiquement plus et quand il le fait, c’est sur un ton plus mesuré.


 


compteur site webcompteur site web